Le bimensuel avait publié deux semaines après le procès des 17 personnes, des photos du jeune otage de 23ans, y compris en une du magazine, où on pouvait le voir le visage tuméfié, bâillonné, un pistolet braqué sur la tempe, montrant des traces de torture.

La famille Halimi avait obtenu de la justice française (Tribunal de Grande instance de Paris, Cour d’appel de Paris puis Cour de cassation) le retrait des photos d’Ilan Halimi des magazines.

Le groupe de presse Hachette Filipachi, propriétaire de Choc, attaquait alors devant la CEDH la République française.

Elle considérait que le retrait ordonné par les juges français constituait une violation de la liberté d’expression et de presse, prévue par l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, dont la France est un des signataires.

L’intérêt de l’affaire sur le plan du droit est que le texte de l’article avait été laissé intact par les juges français, quand les photos avaient, quant à elles, été retirées sur injonction de la justice.

Pourquoi avoir différencié le traitement de l’image du texte, alors que l’un et l’autre « disaient » les mêmes faits ?

La CEDH a pourtant validé le raisonnement français.

D’une certaine manière, par cette décision, les juges de Strasbourg ont dit quelque chose de très important.

L’image fixe ou animée est un support d’information plus sensible que l’écrit ou qu’un média sans image comme la radio. Plus sensible signifie différent. Or, dans la Loi, l'image n'est pas traitée différemment du texte, du point de vue du droit de la presse

Pour nous, cette décision, la première de la CEDH en ce sens, est juste.

Chacun sait que l’image est perçue par l’être humain sur le registre de l’émotion quand le texte fait appel à la raison.

La CEDH aurait pu ajouter que la publication de photos choquantes, s’accompagne parfois de par l’impact émotionnel recherché, d’une tentative de manipulation du regardant. Il n’est nul besoin d’autres commentaires ensuite pour orienter une pensée, une opinion, une réaction.

Oui, la CEDH a ici tracé une voie qui avait déjà été prise par la justice française, celle de traiter l’image de manière différenciée par rapport aux autres supports d’information.

Dans la société de l’image qui se développe devant nous qui nous inonde d'images, cette façon de voir a une vertu pédagogique.

Car elle lance un message au citoyen internaute : méfies toi de l’image !